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  Cupides ou stupides
2/10/06 par ES
 
  Le Dr JPL critique un article paru dans les Nouvelles Calédoniennes: le président du syndicat des médecins libéraux s'élève contre le projet du gouvernement d'imposer un ticket modérateur de 10% aux malades remboursés jusqu'ici à 100%. L'article titre "LES médecins défendent les grands malades" alors que JPL trouve la sortie un peu démago et donne l'impression que les médecins veulent surtout protéger leurs patients les plus "rentables".

Le président du syndicat aurait pu recevoir les 2 lettres suivantes, oeuvres achille-talonesques du Dr ES, l'une de soutien à JPL, l'autre totalement en faveur du président: Pas de jaloux!

Lettre 1

Si mon confrère et ami a mis ses gros sabots dans le plat, permet-moi d’en rajouter une couche. Ton petit syndicat d’épiciers dont tu es le porte-langue de bois a beau utiliser les arguments les plus étriqués pour maintenir à niveau ses étiquettes de prix, qui est encore dupe ? Ton discours est celui d’un naïf ou d’un cynique, montrant bien dans son inquiétude que les tiers-payants sont devenus le fonds de commerce obligatoire de la boutique médicale.
Il appartient pourtant aux médecins d’ouvrir le débat et proposer des idées nouvelles pour essayer, s’il en est encore temps, d’éviter le naufrage du système tout entier, système dans lequel, d’acteurs, nous sommes devenus au fil du temps de pathétiques marionnettes, manipulées par les industriels de la santé d’un côté et tenus à la gorge par les caisses de l’autre. Pourrons-nous encore longtemps continuer cette fuite en avant qui est de prescrire toujours plus et toujours plus cher pour multiplier toujours plus la quantité de consultation journalière au détriment de la qualité ?
A ce rythme, la médecine sera bientôt la première cause de mortalité. Car les malades sont de plus en plus nombreux et continuent de mourir autant, que je sache, et pour un coût de plus en plus exorbitant. La recherche médicale serait-elle vraiment devenue la recherche de nouveaux patients, comme l’ironisait Pierre Dac il y a quelques années ? L’explosion des coûts de nos prescriptions fait que nous ne devons notre survie qu’à l’existence du tiers-payant et nous nous plaignons maintenant que les caisses nous tiennent au portefeuille. Le tiers-payant a déresponsabilisé le patient au grand profit du lobby techno-pharmaceutique dont les bénéfices explosent et les médecins sont les grands bouffons de la farce, ne parvenant à grappiller au passage que les miettes, s’en plaignant, et mettant une fois de plus à nu leur cupidité intrinsèque.
Dé-confraternellement

Lettre 2

Mon cher Ronan
Félicitations pour avoir remis à sa place ce jeune paltoquet mal dégrossi originaire de métropole et bravo pour cette nouvelle et inespérée augmentation d’honoraires arrachée à la Caisse. Je vois que nous avons misé sur le bon cheval en te confiant les intérêts de notre confrérie.
Il va également de soi que le combat prioritaire reste la sauvegarde absolue du tiers-payant intégral qui est le fonds de commerce de tout cabinet médical en bonne santé. Si nous avons œuvré depuis tant d’années à augmenter le nombre de patients pris en tiers-payant, ce n’est pas pour voir ce privilège remis en question.
Une fois trouvée sa pathologie dans la liste, le patient codifié doit être vu en consultation autant de fois que juge le médecin et doit continuer à ignorer ce que nos prescriptions coûtent à la collectivité ainsi que le bien-fondé de toutes ces prescriptions. Celles-ci sont nécessaires à notre économie et à l’expansion boursière des industries pharmaceutiques et technologiques, fer de lance du progrès médical. Le patient nous est déjà suffisamment reconnaissant de pouvoir accéder librement et gratuitement au Grand Supermarché de la Santé pour en demander plus…
Et que ceux, parmi nos confrères idéalistes, qui osent encore nous accuser de cupidité comprennent bien que nous faisons partie d’un Grand But dépassant largement les misérables plaintes individuelles de nos patients. Ce but est le contrôle des mécanismes de la Vie par l’Homme, et il nécessite de l’argent, beaucoup d’argent. Qu’en attendant, les malades soient toujours aussi malades et meurent toujours autant pour un coût de plus en plus exorbitant n’est qu’une réalité naturelle et, dirais-je presque, une nécessité. Après tout, les malades sont souvent des imbéciles, tu le sais autant que moi et la loi naturelle est cruelle et égoïste. Il appartiendra aux élites futures de changer cette loi lorsque nos efforts auront abouti.
Je te renouvelle ma confiance et espère te voir longtemps siéger à la présidence de notre syndicat.
Bien confraternellement
Herbert Schmuck

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